Du Col du Bonhomme aux Chapieux

............C'est alors l'ascension du Col du Bonhomme
Le plus gros dénivelé positif de toute la course ! 1200 mètres à gravir sans répit ! Mais je suis sereine maintenant ! Je sais que je me suis bien préparée. Les entraînements dans les Calanques m’ont habituée à un terrain beaucoup plus difficile ! Il me fallait bien 33 kilomètres pour rentrer dans la course ! Si je supporte le froid, c’est tout bon ! Je perds la notion du temps. Les minutes s’égrènent. Je sais seulement que je dois monter, monter, monter, dans les talons du concurrent qui me précède. Le long serpent lumineux s’étire devant moi. Le rythme est un peu lent mais je laisserais trop d’énergie à tenter de dépasser 5, 10 ou même 20 coureurs. Je reste sagement dans le rang. Je me laisse envahir par la montagne. Je ne la vois pas mais je la sens ! Elle est là, prête à nous anéantir, à déchaîner sur nous les éléments les plus rudes, mais ce soir, elle reste paisible. Le ciel est étoilé. Pas de pluie, pas de vent ! Nous traversons quelques névés, vestiges de sa dernière colère : mi-août, 40 centimètres de neige recouvraient le col du Bonhomme. Je perçois les odeurs de terre et de végétation. Je savoure. Seuls le bruit des bâtons et le souffle court des coureurs troublent le silence.
Déjà le col ! « La montée est plus douce jusqu’au refuge de la Croix du Bonhomme. Vous y êtes presque !» nous annoncent les bénévoles. Encore un peu ! Altitude 2450 mètres ! Vient alors la longue descente vers Les Chapieux. Je cours, je trottine, j’évite les pièges de ce chemin tout en ornières. J’aperçois le ravitaillement tout en bas !
4 heures 26 - Les Chapieux - kilomètre 44. Je m’approche d’une table à l’entrée de la tente ! Pas de chance ! Contrôle des sacs ! J’y ai droit ! Certes, j’ai tout le matériel obligatoire : collant, veste, 2 lampes et piles de rechange, réserve alimentaire, carte d’identité, couverture de survie, casquette, pharmacie … mais ce sont de précieuses minutes que je perds là à tout déballer. Contre mauvaise fortune, bon cœur ! C’est le jeu ! Enfin je peux savourer une bonne soupe ! Pas trop salée ! Quelques pâtes, un peu de fromage ! Je suis trempée ! L’humidité de la montagne et la transpiration m’ont transformée en chiffon mouillé ! Je m’installe à une table ! Une autre soupe ! J’aperçois Philippe. « J’ai très mal à la cheville » me confie-t-il. « Je vais chez le doc ». Je commence à me refroidir ! Voilà une demi-heure que je suis là ! Il me faut repartir ! « Vas-y, avance, je te rattrape ! » Je ne reverrai Philippe que sur la ligne d’arrivée.