Les crêtes commencent à se dessiner dans un ciel moins noir. Le jour approche. Je monte toujours ! Enfin, je peux éteindre la frontale. Il fait encore sombre. Je distingue tout juste les coureurs devant moi, silhouettes fantomatiques qui me guident vers le Paradis ! Il fait très froid. Il faut éviter les plaques de glace. Ne pas glisser ! L’effort me tient chaud ! Le soleil est encore derrière la montagne à droite mais déjà les glaciers s’illuminent sur ma gauche ! Une marmotte crie son mécontentement ! Tout est irréel ! Il est 7 heures du matin, il fait - 2 °C, je suis à 2 500 mètres d’altitude, au beau milieu du massif du Mont-Blanc ! Je n’ai pas dormi de la nuit ! Que du bonheur !!!!!!!


7 heures 15 - Col de la Seigne - kilomètre 54. Le vent souffle fort ! Très fort ! Un bénévole nous attend, emmitouflé comme un Bibendum dans sa tenue de camouflage, épaisse de 10 cm. « Plus bas il n’y a pas de vent ! » nous encourage-t-il !! Vite, vite, j’attaque la descente. J’ai un peu faim et prends un gel énergétique. Un rouge, celui des grands défis !
Mon téléphone sonne. Difficile d’ouvrir la banane, le sac hermétique …
C’est Christian (Sch.)
« Comment vas-tu ?
- Très bien, je suis bien, très bien, c’est super, c’est magnifique, tout est beau, je viens de passer le col de la Seigne, il fait très froid …
- Tu es passée au col à 7 heures 15 et tu es attendue au refuge Elisabetta. Je vous suis sur Internet. Je n’ai jamais tant utilisé l’ordi que depuis hier ! Tu me connais !
- Sais-tu où sont Philippe et René ?
- Alors, je t’annonce que René s’est arrêté et Philippe est juste derrière toi. A un quart d’heure !
- Bla bla bla bla … »
L’arrêt de René est un coup dur ! Je ne peux pas lui téléphoner, il n’a plus de portable. Que s’est-t-il passé ? Je ne dois pas y penser ! Je dois continuer ! Philippe va me rejoindre ! Je me retourne ! Il n’est pas là !